Jean-Michel RENAULT

Source : © Jean-Michel RENAULT

Y a pas de mystère !
Encore moins de « don » !

Aucune fée scintillante ne s’est penchée sur son berceau à sa naissance, autre évidemment que sa mère attendrie, puisqu’il était désiré (bien que devant se prénommer « Catherine » !)… Aucun coup de baguette magique n’a donc pu affubler Jean-Michel Renault d’un quelconque « don ».

Sa fée, elle ne lui est apparue que tardivement, il y a une dizaine d’années. Son prénom : Patricia. Il l’a attrapée et aussitôt espousaillée. Mais ceci est une autre histoire…

Ce « don » qu’on attribue toujours à l’autre lorsqu’on est épaté devant un morceau de bravoure au piano, une émouvante réplique d’acteur ou un « beau dessin », n’a jamais eu pour objet de complimenter, encore moins de valoriser son auteur.

Le mot « don » est lâché à l’oreille de l’artiste comme le coup de sifflet de l’arbitre signifiant le hors-jeu : « C’est épatant, mais c’est pas du jeu, ça ne compte pas, lui il a le don ! ». Hou ! le traître coup de pied en touche ! Hou ! la mauvaise foi ! Hou ! la vilaine excuse pour ne pas avouer sa défaillance, sa complète absence de travail en la matière.

Jusqu’à pas d’heures

Car c’est bien de travail dont il est question, un travail agréable, certes, qui n’a rien de commun avec la mine, mais un travail tout de même car, depuis sa plus tendre enfance, ce sont des centaines de milliers d’heures passées le crayon à la main. Ha ! la « main » ! cette fameuse main magique que l’on pourrait couper, elle dessinerait, dit-on, encore… Voilà une autre escroquerie : « qu’est-ce qu’il est habile ! », s’exclame-t-on comme pour dire : « C’est la main qui fait tout ! »… Mais non, mon général ! Cette main n’est qu’un simple outil, avec seulement cinq doigts, pas un de plus, tout comme la vôtre, lesquels doigts sont gérés par des terminaisons nerveuses qui remontent leurs informations jusqu’aux petites cellules grises du cerveau. « Voyez-vous ça, le dessineux a un cerveau ! » Et oui, l’andouille à képi, il en a autant que vous sous le caillou… Mais il a plus surprenant encore : il a deux yeux ! deux petits yeux curieux qui scrutent, qui analysent, deux yeux perçants, infatigables, entraînés depuis tout petit à dépouiller les choses, à traverser le vrai comme un radar. L’oeil c’est comme un muscle, ça s’éduque, ça se travaille. Et on peut le dire : depuis sa naissance, ses yeux (ses « deux agates » disait sa grand tante Hortense), Jean-Michel les a travaillés, à tel point qu’il ne regarde plus, qu’il voit. En cela, comme on le dit, oui, « Il a l’oeil ! », cet autre outil de précision, éminemment précieux pour le reportage, la photo, le dessin, la caricature et même l’écrit…

Sans se prendre le chou !

Ainsi le parcours de Jean-Michel Renault est jusqu’à aujourd’hui des plus limpides, somme toute assez banal. Dès la maternelle, son oeil donna des formes de crocodile et d’éléphant à sa pâte à modeler alors que ses voisins ne faisaient encore que des boudins, son oeil adolescent épata ensuite ses copains en croquant les profs au tableau, son oeil adulte l’entraîna encore à aiguiser ses points de vue en arpentant le monde, l’appareil photo aux abois… en toute liberté
« Liberté ! », nous y sommes. Cela a toujours été le mot préféré de Jean-Michel, juste avant l’ « Égalité » et la « Fraternité » de son éducation républicaine qui, dans une maisonnée d’instituteurs bouffeurs de curés, avait aussi inscrit dans sa devise « Travail » et « droiture ». La seule religion en odeur de sainteté à la maison, évidemment gauchisante, était surtout le sport: l’école de l’effort gratuit, du dépassement de soi, de la performance… Une enfance libre et heureuse en définitive. Ce n’est pas classique pour un artiste, mais ça se trouve. Cela permet de n’avoir aucun démon à tuer pour avancer, en toute légèreté, sans se prendre le chou ! Une seule embûche lui a tout de même été imposée, classique : « passe ton Bac et tu feras ensuite ce que tu voudras ! ». Le grand plongeon dans le monde des petits mickeys était donc à ce prix ? Soit ! Durant un an les crayons furent rangés au profit de la règle à calcul et du tube à essai, et puis la herse fut levée. Un artiste bachelier mentionné en section scientifique, ce n’est pas classique, mais ça se trouve également.
La suite est le résultat d’une succession de rencontres, d’opportunités, d’expériences, de paris mêmes, que du classique pour qui rien n’impressionne, pour la mule qui aborde les challenges toujours de face, avec insouciance. Un parcours d’amateur en quelque sorte, mais, comme il se plait à le dire, la cinquantaine cette fois bien engagée, un parcours d’amateur, certes, mais « d’amateur bac plus trente-cinq !» . De l’ « amateur » il ne retient et ne revendique en fait que ces deux mots : « aimer » et « mateur ».




Bibliographie


▶ Almanach du Dessin de Presse et de la Caricature (L')
▶ Salvador Dali à la folie !
▶ Tibitin le petit antillais (Les tribulations de)
▶ Vie de ... (La)